TERRES DES MULTIPLES, Rosans 2024


En septembre 2024, j'ai eu l'occasion de réaliser un mois de résidence dans le cadre de l’« Été culturel », organisé par la DRAC PACA dans la commune de Rosans. J’y ai travaillé avec l’ADSEA (Association Départementale pour la Sauvegarde des Enfants et des Adultes) au sein de laquelle cohabitent, l’ESAT (Etablissement et Service d'Accompagnement par le Travail), et le foyer de vie qui est l'établissement pour personnes en situation de handicap ne travaillant pas, ou plus. En parallèle de ces temps, j’ai parcouru les splendides reliefs des vallées rosanaises pour discuter avec ces habitantes et habitants, et plus particulièrement, avec les travailleuses et travailleurs de la terre.

 

J’ai eu l'occasion de mettre en place des ateliers d’initiation à la photographie au sein de l’ADSEA, et de questionner leurs participants sur leur relation à l’image, sur leur représentation d’eux-mêmes, ainsi que sur la représentation qu’ils se faisaient du handicap dans les territoires ruraux. En parallèle, j’ai passé de riches temps d’échange avec d’autres acteurs territoriaux et nous avons, avec ces derniers, co-créé un ensemble photographique où se mêlent, portraits et images de leur quotidien et de leurs paysages. Que cela soit au travail, au cours de leurs différentes activités, ou lors de temps de pause, j’ai pu discuter avec toutes ces personnes et tenter de retranscrire visuellement leurs réalités.

 

J’ai ainsi constaté que, sur ce territoire, dans lequel un demi-millier d’habitants partage des kilomètres carrés d'espaces habitables et cultivables, les problématiques rencontrées illustrent ce que j’observe par ailleurs, sur le territoire national, soit, que la diversité de point de vue économiques, personnelles et politiques crée régulièrement des problèmes de compréhension et d’acceptation de l’autre. Au cœur de ce territoire des Hautes Alpes se croisent, des micro-mondes, se croisent des gens, qui n’échangent pas forcément. La méconnaissance de l’autre, ce voisin inconnu qui traverse les chemins sinueux de l’existence terrestre, entraîne des difficultés de dialogue et de compréhension. Cependant, ce constat global qui pourrait sembler négatif, est atténué par des personnes, que l'on n’aurait peut-être jamais imaginer s’entraider, mais qui contre toute attente s'accompagnent malgré tout au quotidien. Sur un si petit espace, il faut parfois mettre de côté la disparité des points de vue, s'ancrer sur l'essentiel, la terre nourricière et la beauté du vivant qui nous entoure, voilà ce que me semble signifier ces entraides parfois inattendues.

 

L'amour de la terre, de la vie animale, végétale, l'amour de ces paysages montagneux, rassemble tous les habitants de ce territoire. J’ai souhaité mettre en lumière ces éléments qui ont animés les yeux et le cœur de tous les acteurs de ce projet. Une matinée passée chez un ancien berger anarchiste devenu sculpteur ferronnier, une après-midi au cœur d’une abbaye de sœurs bénédictines et cela résume par des pseudos extrêmes, l’incroyable beauté de la diversité humaine, l’incroyable beauté d’un voisinage coopérant au quotidien.

 

L’enjeu de l’acceptation de nos différences, et de là, l'inclusion de toutes personnes, me semble être la base d’un idéal à approcher pour se retrouver dans l’entraide et la solidarité. C'est pour cela que la mise en place d’espaces de rencontres est fondamentale dans la réalisation d'un idéal de cohabitation à réinventer chaque jour.

 

Les mains dans la terre et les yeux vers le ciel, au-dessus de nous, le soleil et la lune transportent la lumière et la puissance de la vie qui s’enracine dans une terre fertile en quête d’un regard doux en humanité.



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